À ce temps-ci de l’année, même les plus courageux d’entre nous, même les plus acharnés aux plaisirs de l’hiver de la motoneige, des promenades sur la glace et autres activités du même acabit commencent à en avoir ras-le-bol de l’hiver, mais surtout du grand froid. En effet, mars est sans contredit le mois qui, ici au Nord du 60e parallèle, nous apporte le plus d’émotions controversées…enfin pas si controversées que ça. En fait, des émotions plutôt claires et évidentes face à l’hiver et qui peuvent se traduire comme suit : « Quand est-ce que le m…hiver va finir? » Que voulez-vous! Ailleurs, dans le Sud, on est en train d’oublier tout doucement ce qui signifie l’hiver. On n’a plus les hivers qu’on avait, dans ce Sud déchiré par le réchauffement de la planète. Par contre, ici, dans le Nord, on se rend bien compte cette année, que le réchauffement prévu, réel, annoncé, n’est pas encore à nos portes et que ce n’est pas pour demain que les palmiers plein de cocos et de singes vont se mettre à pousser ici. Je sais, ce n’est pas très scientifique, ce que je suis en train de raconter là. Loin de moi cette prétention, cela va de soi. Par contre, je ne suis certainement pas la seule à m’être rendue compte que cette année, l’hiver a été particulièrement froid, comme dans le passé, avant mon arrivée dans le Nord.
Souventes fois, j’ai entendu et entendu que les hivers avaient coutume d’être plus froids à l’époque… que le temps se réchauffe. Je n’en ai jamais douté, sauf que cette année, je réajuste mon tir : on a beau dire, il a fait frette pas pour rire.
À ce temps-ci de l’année, il y a des choses qui nous encouragent et d’autres qui nous découragent, souvent les mêmes : en effet, comme les jours rallongent à vue d’oeil, on est porté à croire que la chaleur rallonge aussi, si vous me passez l’expression. Comme on est dans le mois de mars, on pense que le printemps est à nos portes, ce qui n’est pas nécessairement vrai, ici, dans le Nord. La date fatidique du 21 mars, soit l’équinoxe du printemps, ne constitue pas vraiment le printemps réel, je veux dire le vrai. Ce n’est pas avant avril ou mai qu’on peut vraiment dire que le printemps se manifeste, question de degrés.
On se souvient tous de la température qu’il fait lors du Caribou Carnaval : des années, on marche sur une patinoire recouverte d’eau; d’autres années, il vente si fort et il fait si froid que les gens s’entassent les uns sur les autres sous les tentes, pour s’abriter du vent et de la froidure. Et ça se passe à la fin de mars, une dizaine de jours après le 21 mars.
Donc, ici, le 21 mars, c’est une figure de style. Par contre, cette journée, les jours ont bien douze heures, et les nuits, douze heures. Eh oui! C’est l’équinoxe. À partir de cette journée, pendant quelques mois, on dépasse nos voisins du Sud pour ce qui est de la longueur des journées. Ça c’est vraiment quelque chose, les longues journées d’été, des jours qui ne finissent plus pendant des mois. Ce n’est pas tellement difficile de s’habituer à ce phénomène. Quand tu as habité ici pendant assez longtemps, c’est toujours bizarre d’aller dans le Sud, en été. Tu trouves les jours vraiment courts. Ici, en été, on fait deux journées en une. Quand tu finis de travailler, tu peux t’adonner à toutes sortes d’activités de clarté : la pêche, la baignade, les barbecues, les pique-nique, les balades en bateau, en vélo, à pied; ceux qui ont eu le malheur de s’égarer dans un bar à la noirceur flippent quand ils sortent : il fait encore clair et on dirait que ça ne va pas de sortir tout croche d’un endroit tout noir.
Vous vous dites : pourquoi elle a intitulé son article : Signes avant-coureurs? Moi aussi! Non, non, je vais vous en donner, des signes avant-coureurs, si vous ne les avez pas perçus vous-mêmes. Tout d’abord, les oiseaux chantent le matin, quand vous partez travailler (si vous vous donnez la peine de marcher). Les jours qui rallongent, je me suis assez attardée là-dessus. Les gens qui jouent dehors. D’où je vis, je vois le lac et le chemin de glace qui mène à Dettah. Le dimanche, alors qu’il fait beau et que ce n’est pas trop froid, plein de monde joue sur la glace : enfants, adultes, chiens. C’est beau à voir. Tous les sports d’hiver sont à l’honneur. Autre signe : les sourires sur les visages. Quand il fait –50 avec le facteur de refroidissement, les gens n’osent plus sourire : ça va rester figer. Par contre, à –20, c’est tout ce qu’ils veulent, les gens, que leur sourire reste figé. Autre signe que vous avez certainement remarqué : la chaleur dégagée par le soleil. Bienfaisante, confortable, réjouissante! Et je pourrais étirer ma liste d’adjectifs à l’infini.
Sur ces belles paroles, je me rends compte qu’il fait un soleil éclatant, qu’il ne fait pas froid, et que c’est le temps pour moi d’aller jouer dehors. Je vous souhaite un beau mois de mars, et accrochez-vous un sourire. C’est le temps où jamais. Et ça fait tellement chaud au coeur des autres. Ciao!
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