le Mardi 13 mai 2025
le Jeudi 6 mai 2021 16:48 | mis à jour le 20 mars 2025 10:41 Éditorial

Systémique

Systémique
00:00 00:00

La semaine dernière, nous publiions un dossier sur l’offre active de service en français dans le système de santé des TNO. Pour le réaliser, nous avons sollicité les témoignages de la communauté francophone. Plusieurs d’entre vous ont spontanément répondu à notre appel et ont pris le temps de nous raconter vos difficultés à vous faire servir en français par le gouvernement territorial. Cette réponse nous suggère que nous ne sommes pas seuls à avoir observé les problèmes que nous avions identifiés et que ces difficultés sont plus répandues que ce que laissent croire les statistiques triomphantes brandies par le GTNO pour s’autocongratuler de ses efforts en matière de langues officielles. Plus de 35 ans après l’adoption de la Loi sur les langues officielles des TNO, les services en français demeurent fréquemment indisponibles.

Quand on questionne les autorités, la réponse est invariablement qu’il faut faire des plaintes pour que soient identifiées les lacunes et qu’on y remédie. Pour le GTNO, son système fonctionne, mais il souffre simplement de quelques aspérités qu’on colmatera au fur et à mesure. Or, ce n’est pas la réalité sur le terrain. Bien plus qu’un chapelet de défaillances anecdotiques, le problème de prestation des services dans les langues officielles du territoire est un enjeu systémique.

Prenons, par exemple, le cas des prises de rendez-vous à la clinique de soins primaire de Yellowknife. Pour obtenir un rendez-vous, il est nécessaire d’appeler tôt le matin. C’est indispensable, sinon on n’obtient pas de rendez-vous. Or, en appelant, on se fait offrir activement d’appuyer sur le 2 pour le service en français. Ce que le message enregistré ne dit pas, cependant, c’est qu’en faisant ce choix, notre appel est envoyé à une boite vocale et qu’on n’obtiendra jamais de rendez-vous. Ça fait des années que ça dure, mais pourtant, lorsqu’on a signalé le problème aux autorités, la réponse qu’on nous a servie était que le problème était circonstanciel. Le lendemain de cette réponse écrite, nous avons à nouveau tenté d’obtenir un rendez-vous à la clinique en choisissant le service en français, à nouveau notre appel a été envoyé à une boite vocale. On nous a bien rappelé, mais plusieurs heures après que le dernier rendez-vous fut réservé.

Voilà le nœud du problème : avec son insistance monomaniaque sur «l’offre active», le gouvernement des TNO a négligé la prestation des services. On se retrouve avec un système ou les fonctionnaires sont bien entrainés à dire «hello, bonjour!», où l’affichage bilingue est la norme et où le standard nous offre d’appuyer sur le 2 pour le français, mais lorsque le citoyen dit «oui» à cette offre active, le service promis n’existe pas. Cette représentation mensongère mine la crédibilité du gouvernement et encourage les citoyens à dire «No thanks, English is fine» parce qu’ils ont appris que c’est la seule option qui mène vraiment à une réponse.

Il faut que ça change. Une offre active sans prestation de service n’est pas tolérable et ce genre de problématique systémique ne se règlera pas à coups de plaintes individuelles. Le gouvernement doit sortir de son paradigme de l’offre et se pencher sérieusement sur la prestation des services.